Mon carnet parcours de vie : ma mémoire partagée

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Mon Carnet Parcours de Vie – MCPV, ma mémoire partagée est un projet innovant, favorisant l’autodétermination, ayant pour support la technologie numérique. Il est porté depuis plusieurs années par le GNCHR (Groupement National de Coopération des Handicaps Rares).

Pour rappel, le projet d’ »Expérimenter la mise en place d’un carnet de parcours avec les représentants des familles » a été initié en 2015 par plusieurs associations non gestionnaires membres du GNCHR et des associations représentant les personnes en situation de handicap rare (action 34 du Schéma national des handicaps rares (SNHR) 2014 – 2018). Ce projet se poursuit dans l’action 38 du SNHR 2021 – 2025.

En juin 2019, le GNCHR a mis en place un groupe projet composé des représentants des associations non gestionnaires, des associations représentant les personnes en situation de handicap rare des professionnels des ERHR et des CNRHR.

L’état des lieux en amont de l’expérimentation a montré que les outils existants ne répondaient pas aux besoins des personnes en situation de handicap rare. L’enjeu est de s’appuyer sur la personne et son environnement pour créer le carnet de parcours de vie, pour partager son vécu : par exemple pouvoir raconter les vacances passées il y a 2 ans avec ses grands-parents.

Pour réaliser le MCPV, le groupe projet a mis en place une arborescence afin de faciliter, organiser et recenser l’ensemble des traits de personnalités, habitudes, appétences d’une personne accompagnée à travers 7 catégories / thématiques : Qui suis-je ? Mon entourage, Ma vie quotidienne, Mes centres d’intérêt, Mes activités d’aujourd’hui, Je partage avec les professionnels, Mes souvenirs. Cette arborescence représente le contenu du MCPV.

Le choix s’est porté sur Clicker, une application permettant d’inscrire les rubriques de l’arborescence et de réaliser le carnet MCPV.

Le prototype du carnet MCPV paramétré sous Clicker, est proposé en expérimentation auprès des personnes et familles, les professionnels référents-soutien et professionnels accompagnants (éducateur spécialisé, SAVS, …).

Nous revenons ci-après sur la phase d’expérimentation telle que vécue par Alice FACON, conseillère technique au CNRHR La Pépinière.

  • RETROSPECTIVE DU PROJET « MON CARNET PARCOURS DE VIE »
    • 2015-2017 : recensement des ressources et des outils
    • 2018 : passage en mode projet : formalisation des besoins du MCPV
    • 2019-2020 : prospection, états des lieux, démonstration et analyse des outils existants
    • Mars-avril 2020 : formalisation des contenus et de l’arborescence
    • Novembre 2020 à septembre 2021 : expérimentation MCPV : en 2 phases (6 personnes accompagnées puis 6 autres)
    • Mai 2020 : Formalisation de la démarche et de la méthodologie de l’expériemntation
    • Octobre 2021 à septembre 2023 : suivi des familles

Pour ce projet, quels étaient les acteurs de cette phase d’expérimentation avec Inès ?

Alice : Nous avons travaillé avec Cédric Grégorcic, éducateur spécialisé à l’IME La Pépinière qui m’a orientée vers Inès, une enfant de bientôt 9 ans présentant une déficience visuelle avec troubles du spectre autistique. Elle est accueillie en internat modulée à l’IME La Pépinière. Le choix s’est porté vers cette enfant car elle aime être dans l’échange avec l’adulte, elle communique spontanément sur des évènements vécus mais il est parfois difficile de la comprendre, de contextualiser ce qu’elle évoque. Il nous manque souvent des clefs pour la compréhension.

La famille était partie prenante du projet mais Cédric et moi souhaitions d’abord prendre en main l’outil avec l’enfant avant de le proposer aux autres membres de son entourage et de l’intégrer dans son quotidien.

Peux-tu nous raconter comment vous vous y êtes pris pour mener à bien ce projet ?

Alice : Nous souhaitions partir du vécu de la personne accompagnée sous forme de petites séances d’interviews filmées au cours desquelles nous lui proposions de se mettre en scène. « On ne se connait pas, pour te présenter, qu’est-ce que tu peux nous montrer ? »

Avec Inès, nous avons eu des séances toutes les semaines, pendant 1 mois.  En début de séance je lui disais « Voilà Inès, on a 20 minutes, qu’est-ce que tu veux me présenter » ; cela l’invitait à parler vraiment d’elle, de sa personne. En fonction de nos échanges, nous récupérions les films, pour constituer une bibliothèque de souvenirs à partager avec ses pairs, ses éducateurs et rééducateurs.

S’est rapidement posée la question de catégoriser. Nous souhaitions que cela vienne d’elle, que ce soit elle qui range ses souvenirs. La catégorisation fournie par défaut était trop complexe pour la situation de Inès. Par exemple, l’onglet « vie quotidienne » ne lui parle pas. L’interface du MCPV créée avec l’outil Clicker a donc été paramétrée de nouveau avec les mots d’Inès : « IME » « MAISON » « J’AIME » « ‘JAIME PAS ».

Avec ces points d’entrée, Inès s’est mise à se raconter.

Lors d’une séance en particulier, Inès a exprimé son goût pour les histoires et s’est mise à raconter l’intégralité de La chèvre de Monsieur Seguin. Nous lui avons proposé de filmer ce moment et de le mettre dans son carnet. Son point d’entrée était donc « J’AIME ». Dans cette catégorie, nous avons sous catégorisé l’univers d’Inès avec ses histoires et ses musiques.

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Photos de Inès : vue d’écran sur Clicker, catégorisation de ce qu’aime Inès – Crédits CNRHR La Pépinière

Avec Cédric, nous ne souhaitions pas que nos rencontres soient des temps trop pédagogiques mais plutôt des temps d’expression avec support. Nous sommes au tout début, Inès commence à peine à manipuler l’outil.  Pour le moment, elle apprécie de se mettre en scène, de s’écouter. Nous souhaitons qu’elle se l’approprie d’avantage et lui apprendre comment elle pourra l’utiliser au quotidien pour initier une discussion, un temps d’échange.

D’après toi, Mon carnet parcours de vie remplit-il ses objectifs ? Est-il un outil d’aide à l’autodétermination des personnes en situation de handicaps rares et un support pertinent pour les pairs aidants ?

  • LES OBJECTIFS DE MON CARNET PARCOURS DE VIE
    • Conserver en un même endroit l’histoire de la personne
    • Faciliter la communication de la personne avec son l’entourage
    • Créer des moments de plaisir partagé entre la personne et ses partenaires

Alice : Oui, le projet remplit ses objectifs notamment celui de facilitateur, médiateur de la communication de la personne et de son entourage.

L’outil aide Inès à se centrer. Elle est plus présente, elle est attentive, concentrée sur l’échange qu’elle initie.  Ce média va l’aider par la suite à revenir sur des temps particuliers qu’elle a envie de partager en utilisant le retour sonore (synthèse vocale) de l’ordinateur.

En ce moment, avec l’aide d’un adulte pour manipuler l’outil, Inès commente les précédents enregistrements et ses commentaires sont précieux dans nos échanges immédiats. Ce sont ses commentaires qui contextualisent et qui permettent aux aidants de mieux comprendre les temps vécus sur lesquels Inès souhaite revenir. Jusqu’alors, sans support, elle peinait à contextualiser, à se faire comprendre et donc à échanger.

L’outil favorise la démarche d’autodétermination en plaçant Inès au cœur de la formalisation de son parcours. C’est un outil qui se veut accessible à tous, la personne et ses aidants et Inès peut choisir d’alimenter cette bibliothèque de ses souvenirs : son parcours, son vécu, ses appétences.

Photos de la bibliothèque d'Inès
Photos de la bibliothèque d’Inès – Crédits : CNRHR La Pépinière

En quelques mots, quelles sont les principales difficultés rencontrées ?

Alice : Les principales difficultés relevaient des compétences informatiques de chacun pour l’outil support Clicker utilisé pour créer MCPV, prérequis dont nous ne disposions pas tous. Inès n’a pas de compétences en informatique et a encore besoin d’un temps d’apprentissage pour s’approprier l’outil. Nous-mêmes, nous avons dû nous adapter, nous former, découvrir l’outil pour la guider.

Très concrètement, pour une personne déficiente visuelle, sans compétence a priori en informatique, il est difficile de lancer une application, diriger la souris, retrouver une icône (par retour sonore et agrandissement), cliquer ou double-cliquer pour valider un choix, selon la sensibilité du tactile, etc. L’outil reste donc encore complexe pour le public en situation de handicaps rares que nous sommes susceptibles de rencontrer au quotidien : déficiences visuelles avec des déficiences associées.

Cédric et moi n’étions pas toujours à l’aise également, pas assez pour inclure tout de suite d’autres acteurs.

A cette phase d’expérimentation, quelles suites donnerez-vous à Mon carnet parcours de vie ?

Alice : Maintenant que la phase d’expérimentation est avancée, il faut sensibiliser l’ensemble des pairs aidants que forment la famille et l’équipe pluridisciplinaire (psychomotricienne, instructrice en locomotion, orthophoniste, …) ; cela afin que le projet prenne forme dans la continuité.

Cédric propose un second temps, en salle informatique, un temps plus consacré à l’apprentissage de l’outil informatique et à l’utilisation du logiciel Clicker. Le but final est qu’Inès puisse utiliser son outil de façon autonome.

Aujourd’hui, dès qu’un moment plaisir se présente pour Inès, avec la psychomotricienne par exemple ou dans ses activités, ses sorties, etc., le professionnel ou le parent filme Inès en action, puis l’enregistre dans une base de données. Il faudrait que chacun soit formé à l’outil pour filmer et, avec l’accord de Inès, introduire la captation à sa bibliothèque.

Photos de Inès - Le clic en co-action
Photos de Inès – Le clic en co-action – Crédits CNRHR La Pépinière

Propos d’Alice Facon, recueillis par Marina Soler

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