Grâce à un concours de la « Fondation MAIF pour l’éducation », le projet de création d’une boite de 5 carnets braille (alphabet, accents, ponctuation, chiffres et semainier) a abouti en collaboration avec Sylvie Kindt (Pôle Déficiences Visuelles) et Jacques Bermont.
Le petit déficient visuel va pouvoir précocement, s’initier à sa future écriture en la touchant.
Lors de la cérémonie de la remise des boites, l’importance des découvertes tactiles et l’apprentissage des stratégies d’exploration a été listé afin de développer le sens tactile.

La vision et l’ouverture au monde du bébé
Le bébé voyant, vers 10/12 mois, pointe du doigt une chose isolée et inaccessible dans son environnement. L’adulte nomme ce que le bébé a montré. Après plusieurs répétitions, le bébé enregistre le nom de l’objet qu’il a vu. De façon aléatoire, il enregistre aussi l’image de lettres, de chiffres, de mots qui l’entoure comme à table sur les paquets de biscuits, les bouteilles, sur les livres, les enseignes …
Il passe également beaucoup de temps à regarder l’adulte opérer de multiples gestes tout le long de la journée (prendre, poser, échanger, balayer, cuisiner, jouer, lire, regarder la télé…) qu’il s’approprie et imite au fil du temps.
Les sollicitations accessibles aux enfants avec une déficience visuelle :
C’est à travers la dimension ludique que les premières découvertes tactiles vont progressivement donner à l’enfant l’envie d’agir, d’interagir dans son environnement proche et de développer son toucher qui va prendre, par expérimentation, une place primordiale.
Outre le développement de la manipulation fine, le jeu sollicite la patience, la mémorisation, l’apprentissage d’un vocabulaire de plus en plus précis. Il sert aussi à occuper, divertir et permettre à l’enfant d’entrer en interaction avec l’adulte.
Les jeux
Le jeu aide l’enfant à comprendre son environnement qu’il ne voit pas. Le bébé avec une déficience visuelle va avoir besoin de l’aide de l’adulte pour aller à la rencontre de son environnement peuplé d’objets dont il ne soupçonne pas l’existence. L’adulte décrit ce qu’il entend, ce qu’il sent, ce qu’il fait et lui permet ainsi de se créer une image mentale à partir des mots. Par exemple : « ta boite à formes est sur l’étagère, à côté de ton bureau. Tu peux l’attraper en te retournant »
Jouer va aider l’enfant déficient visuel à donner du sens à son toucher
Ces jeux proposés, variés, vont lui permettre de découvrir des sensations tactiles grâce aux textures, tailles, formes, poids, matières, températures… Tout doit être clairement expliqué, expérimenté pour prendre sens. En ritualisant les différentes façons d’aborder un jeu, l’enfant va être rassuré, pouvoir anticiper, deviner les particularités de l’objet dont il va se saisir et maitriser la suite de gestes pour arriver à un résultat.
C’est parce qu’il n’existe que très peu de jeux adaptés, permettant à un enfant et aux adultes qui l’entourent d’apprendre, de découvrir, d’aider à son développement cognitif que nous avons présenté des jeux faciles à transformer et à reproduire afin de diversifier les situations d’exploration, de stimuler la curiosité et d’aller progressivement vers les activités d’apprentissages tout en adoptant les propositions éducatives en fonction de son évolution.

Souvent, il va aimer jouer avec un même jeu, comme par exemple la « boite à formes », qu’il finit par maitriser. L’adulte peut l’enrichir progressivement en les multipliant et complexifiant avec une autre ouverture, forme, texture ou petit objet et lui donner l’envie de découvrir, et s’adapter à la nouveauté.
Les différentes « boites à insertion » constituent des supports simples et intéressants et permettent à l’enfant de comprendre les mots, (un anneau, un cube, une balle… » les verbes (prend, met, tourne, compare…) et les consigne (met les dedans, cherche les cubes…) tout en maitrisant rapidement les gestes nécessaires à la réalisation du jeu.

La première étape est d’aider l’enfant à apprendre une stratégie d’exploration :
- Commencer par la découverte du matériel.
L’adulte accompagne l’enfant dans la manipulation tactile des différentes pièces en les nommant et en décrivant leur spécificité (tailles, poids, textures, différences et similitudes…) ainsi que le type d’ouverture. Il pose des questions et aide l’enfant à verbaliser ce qu’il a compris.
- Puis l’organisation de son espace de travail.
Le jeu est posé dans un plateau à rebord, en silicone pour limiter l’éparpillement des différents éléments, très perturbant pour l’enfant.
- L’énoncée de la ou les consignes qui détermine le sens et l’objectif du jeu.
Les mots et les termes utilisés doivent être clairs, précis et l’adulte doit s’assurer que l’enfant a compris ce que l’on attend de lui en lui faisant éventuellement reformuler les consignes. Pour varier un peu, il existe des jeux du commerce comme les « mémos » sur lesquels il est possible de recouvrir les différents éléments de textures différentes, d’adapter des jeux de domino, avec des textures, des formes, des couleurs ou des chiffres…





Palper, empoigner, effleurer, sentir avec la peau … tous ces jeux vont aider l’enfant à développer sa sensibilité tactile et le préparer à la découverte du braille, sa future écriture, qui participera à la construction de sa pensée.
Nathalie Caffier, éducatrice spécialisée,
Autrice du « le développement de l’enfant aveugle de 0 à 3 ans » aux éditions Les doigts qui rêvent et d’autres travaux pour stimuler le développement cognitif du jeune enfant déficient visuel à travers le jeu et les sollicitations tactiles, et favoriser son inclusion dans les différentes structures de la petite enfance.
Publié le 7 avril 2025